Interview Prince Alla
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Interview Prince Alla

Pour commencer, peux-tu nous expliquer pourquoi tu te surnommes Prince Alla ?
Greetings and love ! On m’appelle Prince Alla car, quand j’étais jeune, j’étais fan de Mohammed Ali, ce grand boxeur. Je le supportais et je disais tout le temps que c’était le meilleur. Alors mes amis m’appelaient comme ça, Prince Alla. Mohammed Ali était un musulman, et ce nom m’est resté, depuis que je suis petit.

Quel genre de relation as-tu avec la religion musulmane ?
Je n’ai aucune relation avec cette religion, car je ne la comprends pas. Je ne comprends que Rastafari. Alors je ne m’aventurerais pas à critiquer une religion, car pour le faire, il faut savoir de quoi tu parles. Moi, j’aimais juste la personnalité de Mohammed Ali, c’était un grand sportif qui gagnait tout, c’est pour ça que je l’admirais, car j’aimais beaucoup le sport.

Tu as passé un long moment de ta vie dans un camp rasta dans les montagnes. Pendant cette période, tu as complètement stoppé ta carrière. Peux-tu nous parler de cette expérience ? Pourquoi ce choix ?
Et bien, un jour où j’étais encore jeune, j’étais chez moi et j’ai vu un rastaman avec une grande robe s’approcher. Il est venu me parler d’Emmanuel. Il m’a dit que c’était un grand prophète et un prince. Et j’ai tout de suite aimé Emmanuel d’après ce que le rastaman me disait, j’ai donc voulu le rencontrer. Alors j’y suis allé, au Bobo Camp sur Spanish Town Road. J’ai rencontré Prince Emmanuel et il m’a parut si sage que je suis resté avec lui au campement. Il m’apprenait beaucoup sur l’amour et l’unité. Il m’a appris à garder le sabbat sain et j’aimais beaucoup cette façon de vivre. Donc je suis resté là-bas à peu près 5 ans. On n’écoutait pas de Reggae Music là-bas, on ne jouait que du nyabinghi, donc je n’ai enregistré aucun morceau pendant cette période. Dès le matin, on jouait du tambour, on lisait la Bible. Pendant le sabbat on ne cuisinait pas, on se lavait pas, on ne faisait que prier. Toute la journée. Et j’adorais ça.

Comment était Prince Emmanuel ?
Je l’ai côtoyé et je peux vous dire qu’il était très sage. Il ne parlait que d’amour. C’est lui qui m’a appris que seul l’amour peut vaincre (ndt : « Only Love Can Conquer » est le titre d’un album et d’une chanson de Prince Alla). Selon lui, nous sommes tous des fleurs dans le jardin du monde. Des fleurs de couleurs différentes qui rendent le monde beau. Car s’il n’y avait qu’une seule couleur, le monde ne serait pas aussi beau. Il faut mélanger les couleurs pour avoir de la vie. C’est comme le drapeau Rouge Or Vert. Toutes les couleurs se côtoient et vivent en paix.

Que penses-tu de la nouvelle génération de Bobos comme Sizzla ou Capleton qui n’hésite pas à employé des paroles violentes envers certaines communautés ?
Et bien, ce que je sais à propos de Prince Emmanuel, c’est qu’il s’agit d’un homme qui prêche l’unité et l’amour quelles que soient la couleur, la race ou les croyances de chacun. Je me souviens qu’il disait que, pour le Tout Puissant, personne n’est plus important qu’autrui. Nous devons prendre soin les uns des autres. Alors, tous ces jeunes Bobos d’aujourd’hui qui viennent avec leur violence, leurs armes et tout ça, qui commettent des jugements, ces hommes-là n’auraient jamais pu vivre dans un camp Bobo. C’est parce que Prince Emmanuel n’est plus là aujourd’hui qu’ils se permettent de dire des choses pareilles. Tu dois avoir de l’amour et de l’humilité pour vivre dans un camp Bobo. Tu dois aimer tout le monde. Tu dois t’aimer toi-même d’abord et ensuite tu pourras aimer tout le monde. Tous ces jeunes Bobos ne s’aiment pas. Ils devraient avoir de la pitié ! Selassie I. Rastafari.

Quelle image voudrais-tu donner de la Jamaïque ?
Que c’est un pays magnifique et que la majorité de ses habitants sont adorables. Mais à cause de la pauvreté et de la souffrance dans certains coins, quelques Jamaïcains deviennent violents. C’est ce qui s’est passé dans beaucoup de villes à cause de la politique. Les politiciens ont utilisé les jeunes car ils avaient faim et qu’ils n’avaient pas de job. Ils les ont utilisés pour se battre contre d’autres frères et sœurs eux-mêmes utilisés par d’autres politiciens. Mais il ne faut pas garder cette image de la Jamaïque. C’est une petite île merveilleuse. Des gens formidables viennent de la Jamaïque, comme Marcus Garvey, Bob Marley. C’est un pays plein de fruits, un pays de verdure et d’eau fraîche, un pays de Reggae Music ! Rastafari.

Peux-tu nous parler de ton tube « Stone » ?
Cette chanson vient de la Bible. Elle parle du prophète Daniel. Daniel dormait une nuit et il a eu une vision d’une grosse pierre qui dévalait la montagne pour s’écraser sur Rome. Mais pour moi, la pierre n’écrase pas que la ville de Rome. Elle écrase tout un système. C’est la pierre de la droiture qui vient détruire toute cruauté. Pas seulement à Rome, même en Jamaïque, aux Etats-Unis. Partout où il y a un système démoniaque, cette pierre vient l’abattre. Alors quand je dis « I-man saw a stone just ah come fi mash down Rome », je ne parle pas d’un endroit précis, c’est quelque chose de spirituel. Alors, les habitants de Rome peuvent se rassurer (rires).

Et quand tu parles de Rome, tu inclus le Vatican ?
Comme je te l’ai dit, je parle de tout un système. Car on sait qu’il existe de bons systèmes pour le peuple tout comme il existe de mauvais systèmes. Le système qui écrase les gens ne peut pas être un bon système. C’est pour cela que j’aime Rastafari, car Rastafari dit que tu n’as pas besoin de mourir pour voir Dieu. Car tu as besoin de voir Dieu lorsque tu es vivant. Quand je te regarde, je vois Dieu. Vous voyez, Dieu n’est pas un esprit dans le ciel, c’est un esprit de la vie présent dans chacun. Alors on ne s’intéresse qu’à la vie, on ne se bat contre personne de précis. On ne va pas stigmatiser le Pape car c’est juste un homme. Aucun homme ne peut régner sur le royaume de Jah. On préfère stigmatiser un système, le système démoniaque. Il n’a pas de nom précis, c’est juste le démon. Car même si le Pape meurt aujourd’hui, le démon continuera de sévir.

Tu travailles depuis plusieurs années avec Asher Selector en Suisse. Peux-tu nous parler de cette collaboration ?
Asher vient régulièrement en Jamaïque depuis longtemps. Il venait souvent dans une boutique de disques appelée High Times ; c’est là qu’on trouve tout le temps Freedom Sound et Earl Chinna Smith. Un jour, le jeune qui travaillait dans cette boutique a emmené Asher chez moi pour me rencontrer et la vibes est tout de suite passée. Depuis le début des années 2000, je vais donc souvent en Suisse chez lui et on fait pas mal de concerts ensemble.

Ce soir, tu jouais avec Anthony John, un jeune artiste jamaïcain installé en France. Est-ce-que tu connais un peu sa musique et est-ce-que tu l’apprécies ?
Non, je n’apprécie pas Anthony John... Je l’adore. C’est un bon jeune, c’est mon frère car on se connaît depuis longtemps. On s’est côtoyés dans un studio qui s’appelait I and I Studio. J’aime beaucoup sa voix. C’est vraiment un bon ami.

Par Djul
Commentaires (2)
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Par semayat le 12/02/2010 à 08:22
Rares sont les intw de Prince Alla!! Big up Djul!!
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Par Crootsy le 12/02/2010 à 22:18
BiG UP Prince Alla !! Rastafari

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