GARANCE REGGAE FESTIVAL 2011
De la boulangerie à la mercerie en passant par la superette du coin, sans oublier les serviettes lovées dans les verres sur les terrasses de restaurants, cette année encore tout le monde aura joué le jeu: la charte graphique est au vert, jaune et rouge.
Plus fort encore, des haut-parleurs répartis dans pratiquement toutes les rues du centre-ville crachent du reggae en continu. Bienvenue à Bagnols-sur-Cèze.
La 20ème édition de l'anciennement parisien Garance Reggae Festival s'installait en terre bagnolaise pour la seconde fois, du 27 au 30 juillet 2011, sur le site du Parc Arthur Rimbaud, bien connu des festivaliers.
Retour, jour par jour, sur un véritable carton !
MERCREDI 27 JUILLET
C'est en fin d'après-midi que le Parc Arthur Rimbaud ouvre ses portes aux premiers arrivants.
Ceux-ci découvrent ou redécouvrent le site: d'un côté la scène principale sur laquelle tous les concerts se dérouleront, puis tout à fait de l'autre côté - comptez 5 bonnes minutes de marche- le Dub Station Corner, qui fera la part belle au sound-systems, et entre les deux, différents stands proposant vêtements, bijoux, vinyles et nourriture variée.
Détail irrésistible: celui du MC d'un des sound-systems détenteur d'un stand s'enthousiasmant à
l'animation et en rythme sur le riddim, au sujet des bons plats préparés à côté !
L'ambiance est donc détendue et le parc se remplit tranquillement.
Aux alentours de 19 heures, les parisiens du Soul Stereo Sound System donnent le coup d'envoi du festival avec une pure sélection qui colle évidemment au contexte: Studio One !
La scène est d'ailleurs décorée pour l'occasion d'un énorme vinyle estampillé Studio One et d'une toile 'Tribute to Coxsone' sur laquelle le célèbre producteur est représenté.
L'hommage au label mythique, souvent surnommé la Motown du reggae, s'avérait très prometteur et en a fait salivé plus d'un.
Qualifié d' évènement 'très attendu par les connaisseurs’, tout le monde y trouvera finalement son compte, entre titres classiques et riddims mythiques.
Peu après 20 heures, la 'Studio One Revue' débute donc, avec un artiste malheureusement encore assez méconnu en France, qui sera un vrai coup de cœur ce soir: Alpheus.
Dernier artiste a avoir été signé chez Studio One, son dernier album 'From Creation' est paru au début de l’année, sortie discrète d'un opus qui s'avère être tout simplement excellent.
Alpheus mêlera donc des titres de ce dernier, comme le titre qui donne son nom à l'album ou le magnifique 'Live and Learn', à des titres plus anciens tirés de son premier album 'Quality Time', sorti en 1999 et produit par l'homme à l'honneur ce soir, Coxsone Dodd.
Il interprète également le sublime 'I wish you were mine', un de ces premiers singles enregistré chez Studio One, et conclut sur une reprise de 'Redemption Song'.
Avec une prestation très agréable et bien reçue, Alpheus aura rempli sa mission et chauffé le public déjà présent.
C'est ensuite une légende vivante qui rejoint la scène: King Stitt, l'un des premiers deejays jamaïcains, est à Bagnols-sur-Cèze ce soir!
L'émotion est forte, d'autant plus forte que le vétéran ne semble pas très en forme.
Il se produit quelques minutes, en se posant notamment sur le ska tranquille de 'Skainy West' et quitte la scène avec la promesse de revenir plus tard au cours de la Studio One Revue.
Winston Francis lui succède, ce dernier semble tout droit sorti du passé: impeccable costume bleu agrémenté de paillettes et une classe carrément anachronique!
Il démarre fort avec son hit 'Mr fix it', puis prend le temps de rendre hommage à Gregory Isaacs en interprétant 'My Number One'.
Il cède ensuite sa place à la touche féminine de cette Studio One Revue: Dawn Penn.
La chanteuse, qui paraît plutôt fatiguée, reprend le classique 'Thank you lord', dévie sur une reprise intéressant de 'Thank you' de Dido et nous quitte pour le moment sur le ska de 'Long days short nights'.
Ce petit avant-goût de la Studio One Revue est alors interrompu par le concert de l'une des principales têtes d'affiche de ce festival: Burning Spear.
A 63 ans, la légende, qui a d'ailleurs lui aussi fait ses premières armes chez Studio One, tient une forme olympique.
Entouré de 8 formidables musiciens et intervenant par moments lui-même aux congas, Burning Spear a offert un show bien ficelé de 2 heures, où tous ses classiques étaient évidemment au rendez-vous: ‘Pick up the pieces’, ‘Slavery days’, ‘Jah No dead’, ‘Marcus Garvey’ et bien d'autres.
Vers Minuit, la Studio One Revue reprenait, un peu plus dynamique cette fois, avec l'enthousiasme de Winston Francis sur 'Let's go to Zion'.
Willi Williams débarque ensuite et récolte un gros forward avec son hit 'Armagideon Time': le pull up est de mise.
La pression monte encore d'un cran quand Prince Jazzbo fait son apparition et interprète 'School' ainsi que le fameux 'Crab Walking' sur le Skylarking.
Dawn Penn revient pour la version avec Jazzbo du mythique 'No, No, No ‘.
La suite est difficile à suivre et l'on devient facilement dépassé par les évènements: les classiques pleuvent, les artistes et les combinaisons se succèdent rapidement.
Lone Ranger et Jim Brown se partagent un 'It haffi bun'; Carlton Livingston nous gratifie d'un énorme 'Rumors'; Dillinger est enjoint par ses camarades, morts de rire, d'interpréter 'Cocaine in my brain': grosse réaction du public.
Ce sound-system à la jamaïcaine s'achève aux alentours de 2h30, mais les artistes auraient pour sûr pu le prolonger jusqu'à l'aube tant ils y prenaient du plaisir.
La Studio One Revue, qui réunissait pas moins de 10 artistes, et Burning Spear, qui se produisait ce soir pour une date unique en Europe, auront fait démarré le Garance Reggae sur les chapeaux de roues avec une première soirée réussie.
JEUDI 28 JUILLET
S'il est vrai que les concerts ne commençaient qu'en début de soirée, la manifestation proposait différentes activités en journée, un festival 'off' avec au programme: projections des films 'Le premier rasta' , 'The Harder they come' ou 'Made in Jamaica', exposition de photographies et rencontres avec certains artistes à la Médiathèque. Tout était donc prévu pour rester dans l'ambiance !
18h20. Le premier concert de cette seconde soirée du Garance Reggae Festival démarre.
Sur scène, il s'agit de Natty, l'artiste montant en Angleterre.
Armé de sa guitare, Natty distille ses bonnes vibes à travers ses titres, pour la plupart issus de son album 'Man Like I' sorti en 2008, comme 'Colored souls', 'Revolution' et bien sûr le hit qui l'a propulsé au devant de la scène 'Bedroom eyes'.
Il présente également des sons plus récents tels que l'intéressant 'Gunman'.
Son style cross over soul-reggae aura séduit, même si la foule était encore très éparse.
A 19h30, Clinton Fearon fait son entrée sur la scène du Garance reggae festival, qu'il foule pour la deuxième année consécutive!
'Chatty chatty mouth' donne tout de suite le ton.
L'artiste est accompagné de son Boogie Brown Band, avec un Izaak Mills en pleine forme - et aux cheveux teints en vert- au saxophone, qui se montrera brillant sur 'Rich Man Poor Man'.
Clinton Fearon se produit durant une heure, le tout est irréprochable et terriblement bien reçu par le public, qui connaît bien l'artiste.
Ken Boothe nous lance ensuite une invitation au voyage, invitation à laquelle un nombre important de personnes amassées devant et autour de la scène répondent.
L'artiste est accompagné une nouvelle fois par les musiciens français de No more Babylon.
Le set n'est quasiment pas modifié, pour ceux qui l'auraient vu lors de ses dernières tournées, mais il est impossible de se lasser de telles merveilles: 'Silver words', 'Crying over you', le sublime 'Without love' s'enchaînent tranquillement puis 'When I fall in love', 'Artibella' et sa variante en dancehall ainsi que 'Is it because i'm black' viennent secouer le public.
Ken Boothe quitte la scène après le classique 'Everything I Own'.
Le public le réclame et il revient pour un entraînant 'Freedom street'.
Mr Rocksteady, la classe personnifiée, n'aura une fois de plus pas déçu et fait rêver tout un chacun sur une époque que beaucoup regrettent.
Après une nouvelle pause d'une vingtaine de minutes - prévue entre chaque concert-, c'est l'un des artistes les plus attendus de la programmation qui est accueilli on ne peut plus chaleureusement par des milliers de personnes : Jimmy Cliff.
Avec 'Reggae Night’, l'artiste répandra l'euphorie dans le public et fera l'unanimité: des plus petits pas encore couchés aux plus âgés esquissant encore, malgré la fatigue, quelques pas de danse.
23h40. La combinaison était prometteuse: Junior Reid accompagné d'une des meilleures sections rythmiques de l'histoire du reggae. Une promesse mal tenue qui se transformera en déception.
Sly Dunbar et Robbie Shakespeare débarquent et nous bombardent tout de suite de riddims mythiques: Swing Easy et Real Rock pour ne citer qu'eux.
Le public est très enthousiaste, mais déchantera vite.
L'attente se révèle longue, les instrumentaux s'étirent et le musicien qui s'empare du micro pour quelques reprises dont 'Tune in' du Cocoa Tea ne parvient pas à calmer l'impatience qui s'installe.
Au bout de pratiquement une heure, les fils de Junior Reid, Andrew & Wada Blood, déboulent sur la scène et présentent leur single 'Feelin Irie', mi-chanté mi-crié, puis s'éclipsent aussi vite.
Junior Reid arrive finalement, avec 'Boom Shack-a-lack' et Great Train Robbery'.
Le hit 'One Blood' interprété sans grande énergie provoque une réaction mollassonne dans le public puis, fait consternant, Junior Reid s'en va déjà.
Il aura chanté en tout et pour tout 4 titres et son départ prématuré laisse le public perplexe et frustré.
Un mal pour un bien. Midnite démarre donc quelques minutes plus tôt que prévu.
Le groupe des Iles Vierges, avec le fameux Vaughn Benjamin au lead vocal, offre au public un show envoûtant mais court, trop court quand on sait que la formation a l'habitude de jouer bien plus longtemps, parfois même plus de 3 heures !
C'est cependant la règle du jeu dans le cadre d'un festival, et l'heure de concert qui leur est accordée sera utilisée de fort belle manière.
Le final, composé de titres comme 'Love the life you live' ou le puissant 'Due Reward', tiré de leur premier album 'Unpolished' (1997), est énorme.
Le public en redemande, mais il est 2h30, l'heure c'est l'heure, il faudra attendre demain pour prendre de nouvelles vibes.
Le compte-rendu des 2 dernières journées du Garance Reggae Festival à lire ici