Reggae Loves Soul
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Reggae Loves Soul

Le flirt entre reggae et soul ne date pas d'hier. Déjà dans les années 60 et 70, les pionniers de la musique jamaïcaine reprenaient régulièrement des titres de leurs modèles américains comme les Temptations, les Impressions, les Supremes... Certaines reprises sont même devenues des classiques à l'image de « Ain't No Sunshine » de Bill Withers si bien revisité par Horace Andy ou Ken Boothe. Cet album « Reggae Loves Soul » remet la tradition au goût du jour avec une pléiade d'artistes modernes (et d'autres moins) chargés d'adapter des classiques du genre à leur sauce. Et on n'est pas peu fiers de rappeler que c'est un label français qui a eu cette idée ! Big up à Undisputed Records pour cette initiative à soutenir au maximum. Ça commence fort avec une rencontre vibrante entre Skarra Mucci et Chezidek sur le tubesque « Sunny » de Bobby Hebb. Rassembler Skarra et Chezi, il fallait y penser et le duo improbable vient s'ajouter sans avoir à pâlir à la longue liste de stars ayant interprété ce fameux titre de 1966 (Marvin Gaye, Frank Sinatra, Boney M, Stevie Wonder...) Le reste de la tracklist permet d'entendre des titres peut-être moins connus du grand public. On avoue même carrément découvrir certains titres et c'est tant mieux. Après une écoute attentive des versions reggae, on file dénicher les originaux (merci Internet !) et les comparaisons vont bon train. Diana Rutherford livre une interprétation de « Trouble, Heartaches And Sadness » très fidèle à l'originale d'Ann Peebles, tout aussi bouleversante, quand Hopeton James & Ranking Joe dynamisent à merveille « Just My Imagination », classique parmi les classiques, des Temptations. Mis à part la surprise Skarra Mucci, Undisputed Records a choisi des voix parfaitement calibrées pour la soul comme Turbulence et Glen Washington qui s'ajoutent à la liste de Yardies présents sur la compil'. Mais les Européens n'ont pas à rougir comme le prouve la franco-italienne Marina P qui sublime le « I Wish I Were That Girl » de Wendy Rene que le monde du reggae a déjà entendu grâce au puissant « After Laughter » de Weedy G (où l'on retrouve d'ailleurs Skarra Mucci et son hit « My Sound »). L'Anglaise Faye, le Hollandais Maikal X et les Français Jezzaï et Mystic Loïc sont aussi à la hauteur et on fait même une superbe découverte... Mais qui est ce Paul Noyah qui nous offre un « Saint James Infirmary » tout droit sorti des années 30 ? La trompette de Tribuman nous remet en tête l'interprétation de Louis Armstrong et fait de ce titre l'un des plus réussis et des plus émouvants de l'opus. L'émotion est d'ailleurs le fil conducteur des 13 titres et les cuivres n'y sont pas pour rien. On retrouve du reste une magnifique version instrumentale cuivrée du « Four Women » de Nina Simone qui nous suggère simplement que le reggae n'aime pas que la soul, mais aussi le jazz et le blues. Tout ça est clôturé par deux dubs - ceux de « Sunny » et « Troubles, Heartaches And Sadness » - comme pour nous rappeler qu'il s'agit bien d'un album reggae... Les amateurs du genre s'y retrouveront, ça c'est sûr. Reste à savoir si les fans de soul apprécieront, mais on n'en doute pas une seconde.



Par Ju Lion
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