Debrouya - 21 grammes
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Debrouya - 21 grammes

Hustle music. Debrouya illustre habilement cette nouvelle génération d’artistes qui exporte la musique made in Caribbean et élargit ses frontières à force d’évolution. Avec ses compatriotes Keros-n et Young Chang MC, le guadeloupéen fait partie de ces deejays hybrides qui sont aussi doués en dancehall qu’en hip hop.
Révélé en 2010 avec N.E.R.D (remix du hit "Black & Yellow" du rappeur américain Wiz Khalifa), Debrouya vacille longtemps entre rap et dancehall, avant de laisser finalement sa passion pour le hip hop trancher. Il abandonne en 2011 le style dancehall et hip hop kréyol pour un flow futuriste chantant, éclectique, le tout mis en mélodie par des prods mystiques tantôt aériennes tantôt sombres. Sans surprise, les textes qu’il kicke dans un créole épicé d’anglais parlent "chill", "money", "way of life". Et le choix opéré s’avère payant : le succès ne se fait pas attendre quand il met en ligne les clips de "Work and Chill", "Yezir", et "Love aw’".
Après un premier album "Débrouya pa péché" à la suite duquel il a enchaîné deux mixtapes, Debrouya revient à la pesée avec ce second disque. 
 "21 grammes" répond aux exigences et se présente comme l’album de la confirmation. Debrouya, qui se savait attendu du fait de son succès devenu mitigé depuis 2012, a choisi de répondre au mauvais œil par une approche élaborée et des plus futuristes, affirmant plus que jamais son identité musicale tout au long de ces 15 titres.
Une ambiance bipolaire, à mi-chemin entre la résignation et la rédemption. "21 grammes" est un vaisseau qui nous extrait de la 3ème dimension pour nous embarquer dans un voyage irrationnel. Avec une nouvelle fois le hip hop en guise d’univers sonore principal, ce nouvel opus s’introduit par deux titres bruts singuliers de par leur rythme effréné, et Debrouya démontre enfin sa capacité à allier la forme et le fond.  Si "Porte d’enfer" annonce le retour aux sources tant attendu, "Sonjé" s’affirme comme l’un des morceaux phares de "21 grammes" : l’artiste effectue un flashback sur sa carrière et nous en raconte les péripéties ponctuées de celles de sa vie d’homme.
Les comptes réglés, Debrouya peut désormais poursuivre son envol vers des horizons plus clairs avec "Pa pè" ou encore "Bwé & fimé" ; des hits comme lui seul en a le secret. Si l’on est ravi de la maturité de "Porcelaine" orné d’un sample old school, la grande surprise de "21 grammes" intervient sur les notes reggae de "Karma". Debrouya nous parle de son vœu de liberté, de bonnes énergies, et de droiture en compagnie du martiniquais Stone J qui signe un refrain magistral inspiré et taillé sur mesure, de quoi garantir au morceau un très bon accueil.
Abouti et hétérogène, « 21 grammes » est un album qui, malgré le manque de grandes pointures en invités et l’absence de voix féminine, démontre la constante évolution artistique de Debrouya. Le pari de livrer un disque ingénieux et réfléchi tout en restant en accord avec son identité était risqué mais s’avère réussi.  L’effort d’ouverture musicale laisse entrevoir une orientation vers une musique plus large, mieux adaptée au potentiel de Debrouya qui, s’il chantait en anglais pourrait prétendre à un succès international.

Par Jason Moreau
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